dimanche 28 août 2016

"L'Assassin Qui rêvait d'Une Place Au Paradis" de Jonas Jonasson



En Bref :

Après trente ans de prison, Johann Andersson, plus connu sous le nom de Dédé le Meurtrier, est enfin libre. Mais ses vieux démons le rattrapent vite : il s'associe à Per Persson (réceptionniste sans domicile fixe) et à Johanna Kjellander (pasteure défroquée) pour monter une agence de punitions corporelles. Des criminels ont besoin d'un homme de main ? Dédé accourt ! Moyennant une large commission.

Alors, le jour où il découvre la Bible et renonce à la violence, mettant en péril la viabilité de l'entreprise, Per et Johanna décident de prendre les choses en main.


Mon Avis : 

Voilà bien le genre de livre fait pour gagner de l'argent.  Après "le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire", bien sympathique car novateur dans son genre, nous avons eu "l’analphabète qui savait compter".  Là on se disait :"Ouais, ok, c'est sympa mais bon, déjà vu". Nous continuons dans la lignée sauf qu'ici il s'agit bien d'un livre I-N-U-T-I-L-E.

Les évènements se succèdent à un rythme effréné, les personnages caricaturés au possible, des péripéties rocambolesques voir burlesques... Ça marche une fois, mais pas plus.

J'aime parfois l'humour absurde, les histoires décalées... Mais là il s'agit simplement d'une catastrophe littéraire. Quel calvaire !


Extraits :

"Le réceptionniste retrouva son souffle ainsi que l'usage de la parole, et il expliqua à Dédé en termes simples ce que signifiait vingt pour cent de quelque chose.
Le meurtrier s'excusa : s'il était devenu pro du calcul quand il s'agissait d'additionner les années de prison, les pourcentages, quand à eux, n'étaient pas sa tasse de thé. Il savait tout de même que l'eau de vie chiffrait à quarante pour cent environ et que cela allait parfois bien au-delà dans le cas d'alcools produits par divers distillateurs peu scrupuleux. Au cours des précédentes enquêtes policières, il avait été établi qu'il avait fait passer ses médocs à l'aide d'alcool à trente-huit pour cent issu du commerce et d'une gnôle maison à soixante-dix pour cent. Certes, il ne fallait pas trop se fier aux enquêtes de police, mais si les flics avaient raison, alors il n'y avait rien d'étonnant à la façon dont les évènements avaient tourné, avec cent-huit pour cent d'alcool dans le sang et des comprimés en plus."
***


" Dédé avait peut-être essayé toutes sortes de drogues, mais on ne pouvait pas l'accuser d'être accro au travail."



Les putes voilées n'iront jamais au Paradis, de Chahdortt Djavann



En Bref :

Ce roman fait alterner le destin parallèle de deux gamines extraordinairement belles, séparées à l’âge de douze ans, et les témoignages d’outre-tombe de prostituées assassinées, pendues, lapidées en Iran.

Leurs voix authentiques, parfois crues et teintées d’humour noir, surprennent, choquent, bousculent préjugés et émotions, bouleversent. Témoignent.

À travers ce voyage au bout de l’enfer des mollahs, on comprend le non-dit de la folie islamiste : la haine de la chair, du corps féminin et du plaisir. L’obsession mâle de la sexualité et la belle blague de ceux qui célèbrent la mort en criant « Allah Akbar ! » pour mieux lui imputer leurs crimes.

Mon avis : 

Percutant.
Autant que le titre, provoquant.
C'est dur, c'est cru, c'est direct.
Mais si réel.
Ce récit très engagé nous oblige à penser, nous secoue, nous réveille.

Oui, il y a des pays où la femme n'est que la possession de l'homme.  L'homme possède, humilie, dénigre, profite.  Des pays où le meurtrier se voit encensé pour avoir éliminé de la vermine en tuant des prostituées. -"Bien fait pour elles!"-.  Des pays où les mollahs, si vertueux, trouvent des combines pour eux-même profiter du fruit de ce qu'ils condamnent. Supercherie. Tartufferie.

Or ces femmes ont toute une histoire, une raison, un but.  Par plaisir, par besoin, par obligation ou par malchance, elles en arrivent à faire clignoter leurs foulards sur le bord d'une route ou dans un lupanar.
Ces histoires sont riches à écouter, à lire.

On se prend de compassion pour Zahra et Soudabeh.

Mais soyez averti. C'est du cash, du trash, du cru.  C'est du sexe, de la violence, des mots chocs.
Pas de langue de bois.

J'ai aimé, et surtout j'y ai vraiment beaucoup pensé, toujours maintenant.


Extraits :

"Car la mère, les sœurs, les femmes, les filles et les nièces d'un homme constituent ce qu'on appelle son nâmous. Nâmous, mot arabe/ persan/ turc, est un terme chargé de sens traditionnel et religieux dont l'équivalent approximatif serait l' "honneur sexuel de l'homme incarné dans le corps de la femme ". D'où l'existence du "crime d'honneur", crime d'horreur. Les femmes sont les biens des hommes de leur famille et elles restent jusqu'à leur mort sous tutelle masculine"

***
"Assassinées, pendues ou lapidées. Je vais exhumer ces femmes et les faire exister dans votre imaginaire pour le malheur des ayatollahs, et écrire noir sur blanc qu'elles n'étaient pas des souillures, que leurs vies n'étaient pas condamnables, et que LEUR SANG N’ÉTAIT PAS SANS VALEUR. Qu'elles méritaient la vie et non pas la mort. Qu'elles n'étaient pas la honte de la société. Qu'elles n'étaient pas des coupables, mais des victimes assassinées."

***

" Depuis la découverte des corps de femmes en tchador, aucune disparition correspondant aux victimes n'avait été signalée à police. Comme si ces femmes assassinées n'avaient ni mère, ni père, ni frères, ni sœurs, ni mari, ni famille, ni amis, ni enfants...C'étaient des parias dont nul ne s'était inquiété ou que nul n'avait osé rechercher auprès de la police"









"La Route" de Cormac Mc Carthy


En Bref :

L’apocalypse a eu lieu. Le monde est dévasté, couvert de cendres. On ne sait rien des causes de ce cataclysme. Un père et son fils errent sur une route, poussant un caddie rempli d’objets hétéroclites et de vieilles couvertures. Ils sont sur leurs gardes car le danger peut surgir à tout moment. Ils affrontent la pluie, la neige, le froid. Et ce qui reste d’une humanité retournée à la barbarie.

Mon avis : 

Pour une histoire noire, c'est une histoire noire.
Difficile de trouver une once de lumière dans ce roman où chaque jour passé sur la route n'entraîne que souffrance et désillusion.  Un petit garçon qui crève de faim, un père qui sent bien que tout est perdu d'avance, un monde réduit en cendre où rien de pousse, où rien ne vit, ou presque, des bandes anthropophages organisées pour traquer les survivants...
Comment dire ...

Rien de plus déprimant.


Extraits :

"L'homme ne cessait de regarder le petit; émacié, le visage gris, les yeux saillants.
Combien de temps encore?
Depuis deux jours ils avaient fini la boite de salade de fruit.
Depuis deux jours ils n'avaient plus rien à manger.
Il faut continuer, marcher vers le sud, fuir l'hiver qui leur glace le sang.
Pourquoi faire?"
***
"Il sortit dans la lumière grise et s'arrêta et il vit l'espace d'un bref instant
l'absolue vérité du monde. Le froid tournoyant sans répit autour de la terre
intestat. L'implacable obscurité.Les chiens aveugles du soleil dans leur course.
L'accablant vide noir de l'univers. Et quelque part deux animaux traqués
tremblant comme des renards dans leur refuge. Du temps en sursis et en monde en
sursis et des yeux en sursis pour le pleurer."


"Mille Soleils Splendides" de Khaled Hosseini


En bref :

Forcée d'épouser un homme de trente ans son aîné, Mariam ne parvient pas à lui donner un fils. Après dix-huit années de soumission à cet homme brutal, elle doit endurer une nouvelle épreuve : l'arrivée sous son propre toit de Laila, la nouvelle femme de son mari, agée de quatorze ans. Enceinte, Laila met au monde une fille.



Les années passent, longues comme des veillées funèbres. Massoud est assassiné. et les Talibans installés. De rivales, Mariam et Laila deviennent alliées, sœurs de malheur face au despotisme des pères, des maris et de leur cortège de lois inhumaines. Dans la prison de leur exil intérieur, elles unissent leur courage pour tenter de fuir l'Afghanistan et sa folie meurtrière, et partir au Pakistan



Mon avis :

Superbe récit mené magistralement par Khaled Hosseini, comme à son habitude.  Nous voyageons ici au cœur d'un Afghanistan traditionnel; où la vie des femmes est rythmée par les coutumes et les dictas de leur mari.  Nous vivons avec autant d'intensité les histoires d'amour cachées, la montée de la violence et de l'absolutisme islamiste.  C'est un combat de tous les jours que mènent ici Mariam et Laila, un combat contre la vie, contre les hommes mais un combat pour la liberté.

Un livre qui secoue, franc, direct et sincère.   Une poésie cachée au milieu de ces couleurs chaudes de l'Afghanistan.  Une leçon de courage.

Bonne lecture sans aucun doute !


Extrait :

"Mariam regarda les flocons de neige tournoyer devant la fenêtre en se rappelant les paroles de Nana: chaque flocon était en réalité un soupir poussé par une femme accablée, quelque part dans le monde. Toutes ces plaintes silencieuses montaient au ciel et y formaient des nuages de plus en plus gros, jusqu'au moment où ils se brisaient en minuscules fragments qui tombaient sans bruit sur la terre.
"C'est pour rappeler aux gens ce que toutes les femmes comme nous peuvent endurer, avait-elle ajouté. Sans jamais se plaindre, en plus".

***

"Devant la grimace de Tarik, Laila comprit que les garçons différaient des filles. Eux ne faisaient pas étalage de leurs sentiments. lls n'éprouvaient aucun besoin de s'avouer ce genre de chose. Elle supposa que ses frères avaient été pareils. Pour eux, l'amitié était comparable au soleil : son existence était irréfutable, mais si on appréciait sa lumière, on ne la regardait pas en face."


"Ne Tirez Pas Sur l'Oiseau Moqueur" de Harper Lee


En Bref :

Maycomb, petite ville d’Alabama, au moment de la Grande Dépression, entre les années 1929 et 1933. Une petite ville à l'intérieur des terres, occupée depuis des décennies par des grandes familles, où tout le monde se connaît.   Certaines souffrent plus que d'autres de la dépression économique mais la vie continue pour chacun, au gré des ragots, des potins, des bêtises des enfants et des préjugés.
Atticus Finch élève seul ses deux enfants, Jem et Scout. Homme intègre et rigoureux, cet avocat est commis d’office pour défendre un Noir accusé d’avoir violé une Blanche.  C'est le début pour eux de moments difficiles, racontés pourtant avec espièglerie et sensibilité par Scout, la benjamine.

Mon avis :  

Cette époque est très intéressante et l'histoire, loin d'être un roman d'action ou une avalanche de jugements, nous aide simplement à nous y plonger et à comprendre par nous-même l'essence d'une vie rurale en pleine crise économique.

L'auteure a pris la peine de parsemer son récit de faits historiquement importants, ce qui nous aide à nous y plonger davantage. Elle domine toute l'histoire de façon drôle, simple et complexe à la fois.  Nous avons l'impression de lire un roman accessible à tout âge mais abordant pourtant de manière très subtile les thèmes du racisme, de la ségrégation, de la justice ainsi que la complexité d'une vie rurale, nous amenant à pardonner une vision tronquée de la réalité.  (Impression déjà perçue dans "En attendant Bojangles" et dans chaque roman narré par un enfant.)

Le petit bémol pour ma part est l'extrême perfection d'Atticus, le père, qui tient presque de l’irréel.

Bonne lecture en somme !

Extraits :

"Je voudrais que tu comprennes ce qu'est le vrai courage. C'est savoir que tu pars battu d'avance, et malgré cela, agir quand même et tenir jusqu'au bout."
***

Nous nous faufilâmes près de Miss Maudie qui regardait autour d'elle.
- Où étiez-vous, tous les trois? Vous n'avez pas entendu ce raffut?
- Que s'est-il passé? demanda Jem.
- Mr Radley a tiré sur un nègre dans son carré de choux.
- Oh! Il l'a touché?
- Non, dit Miss Stephanie, il a tiré en l'air, mais l'homme doit être blême de peur. Il dit que celui qui verra un nègre blanc par ici saura que c'est lui. Il dit que son autre cartouche partira au prochain bruit qu'il entendra dans ce carré et que, cette fois, il ne tirera pas en l'air, que ce soit un chien, un nègre ou... Jem Finch!
- Pardon? demanda Jem.
Atticus intervint :
- Où est ton pantalon, mon garçon?
- Mon pantalon, père?
- Exactement.
A quoi bon nier en caleçon, devant Dieu et tout le monde? Je poussai un soupir.

***

"(...) mais avant de vivre en paix avec les autres, je dois vivre en paix avec moi-même. La seule chose qui ne doive pas céder à la loi de la majorité est la conscience de l'individu."